Atelier collaboratif d’écriture du 23 juin 2018, avec les idées de mes deux compagnons de tables, Myriam et Aurore. Écrit en 1 heure tout compris, non-retravaillé depuis…
23 juin 2050, je me réveille et j’apprends que les citoyens ont pris le pouvoir. J’ai mis un peu de temps à comprendre. Ma nièce de six ans déboule en criant dans la chambre : “on a gagné on a gagné !”. Encore ensommeillé, je ne pense pourtant pas qu’il y avait match hier soir. Elle repart aussi vite qu’elle était venue.
D’un signe de la main, j’allume mon écran mural et l’interface en relief apparaît. J’ai reçu 2733 messages durant la nuit. L’un est mis en avant, il provient de la Ville de Paris et est intitulé “Notice d’expulsion rooftop présidentiel.” Mon sang ne fait qu’un tour. Sautant de mon lit, je découvre qu’une foule festive est amassée au pied de mon Arc de triomphe, juste en dessous de moi.
— Assistant, appelle M. Henri immédiatement !
Le visage de mon conseiller apparaît sur le mur, l’air aussi inquiet que moi.
— Henri, qu’est-ce que tout ce tumulte ?
— M. le président, les Uptoyens fêtent l’inauguration de l’application Gouv’Audace.
— Hein ? C’est le truc voté à l’assemblée le mois dernier ? Pourquoi ça ressort maintenant ?
Il lève les yeux au ciel.
— Il y avait un mois de préparation, pour que les Up’toyens s’emparent de leurs sujets, et hier soir était le premier vote massif.
— Bon, peu importe ces gadgets technologiques. J’ai reçu un message d’expulsion, qu’est-ce que c’est que cette histoire.
— C’était justement un des sujets du vote d’hier. La majorité a décidé que votre rooftop au sommet de l’Arc de triomphe redeviendrait public, un point de vue sur les jardins de la place…
— Quoi ? Pour qui ils se prennent ? Ils n’ont pas le droit ! C’est quoi ce délire de fake news ? Je croyais qu’au moins depuis l’effondrement de Google on en avait fini avec ces balivernes !
Tout en parlant, j’ouvre mon placard, qui a sélectionné d’avance un costume pour la journée, un tissu irisé dont les bras-écrans me permettent d’emporter ma visio-conférence dans le salon.
Ma femme est sur le canapé, à contempler le lever de soleil, un verre de champagne à la main. Oubliant Henri affiché sur ma manche, je comprends à son sourire qu’elle en sait déjà plus que moi.
— Bonjour mon chéri. J’ai préparé mes affaires pour le déménagement.
— Je ne vais pas me laisser faire ! Je suis le président de la 5e République…
— Je savais bien que tu n’avais rien compris à cette loi… tu n’as plus aucun pouvoir mon chéri. On est passé à une société participative. Les citoyens sont tirés au sort pour voter sur les enjeux de sociétés. Ils ont eu un mois pour s’emparer de la première volée de sujets, et à présent ils ont voté pour le droit des animaux, l’ouverture des frontières, la mise en commun des forêts… et même la récupération de l’Arc de triomphe !
Elle se lève avec un sourire narquois et finit son verre.
— De toute façon, j’ai toujours détesté nos appartements présidentiels. On va revenir à une vie plus simple. J’ai réservé une nouvelle suite.
Ma nièce la rejoint à cet instant, une veste sur le dos et ses chaussures aux pieds. Je suis affolé.
— Une suite ? Mais où ?
— Tu te rappelles, tu voulais ce rooftop au sommet de l’Arc de triomphe parce tu adorais les cabanes dans les arbres quand tu étais petit ? Maintenant, nous allons pouvoir vivre nos rêves. J’ai réservé une cabane dans les arbres, dans la nouvelle Fontainebleau.
Elle jette son manteau sur ses épaules et, tandis qu’elle se dirige vers la porte, je peux lire dans son dos “I REALLY DON’T CARE, DO U ?”